Robin des Bois
Au moment où l’histoire commence Il a un peu plus de trente ans. C’est un justicier au grand cœur. Il se bat pour reprendre aux riches ce qu’ils ont volé aux pauvres et le redistribue inlassablement. C’est un héros libre. Il a pourtant une faille son fils Adrien. Un enfant que Marianne son premier et seul amour lui a caché avant de le quitter quinze ans plus tôt.
M. Pokora.
Dans le clip de Juste un instant, on le retrouve sous toutes ses facettes : séducteur, vivant, félin, performeur, usant du second degré, romantique, multipliant déhanchés et pas de danse. Un carpe diem endiablé en ouverture, des chœurs enlevés et les mots de Soprano. La chanson ouvre une brèche. S’inventer sans se renier, c’est le tour de force ici de M Pokora. Indéniablement, le garçon a franchi un cap. Ces chansons-là ont la lumière de l’été. Quinze pistes à la production impeccable et soignée. Il y a suffisamment de trouvailles sonores et de climats variés pour colorer son groove. C’est agité et tendre, dansant et mélancolique. Un état permanent de transition vers des sensations plus adultes. Cet album, c’est son miroir. Parce qu’il correspond à son était d’esprit actuel. Pas de faux-semblants. De toute façon, il ne sait pas tricher. Ce n’est pas dans sa nature. Il a pris sérieusement le contrôle de son futur.
La gestation d’A la poursuite du bonheur n’a été ni longue ni tourmentée. Elle a embrassé une dynamique réelle et éclatante. M Pokora fait part de ses envies, de ses goûts musicaux. Il cite notamment Coldplay et U2. Son entourage proche, le même depuis huit ans, le met sur la piste de Matthieu Mendès, auteur d’un probant album éponyme en 2005. Les deux garçons se croisent au Zénith de Paris lors de La Fête de la Jeunesse. Ils s’échangent les numéros. Et partent, presque dans la foulée, en séminaire au studio Polygone à Toulouse. Entre eux, feeling immédiat. Quatre titres bouclés en quarante-huit heures. Fusion parfaite des velléités pop-rock de Matthieu Mendès et des aspirations urbaines de M Pokora. Cet arsenal se déploie sur le percutant Mourir ce soir, guitares en avant sur le refrain et harmonies vocales. On le retrouve également sur le fougueux Cours qui bascule vers une intensité crescendo ou l’épique Sauve-toi, tourbillon sonique annonciateur de la fin du monde.
M Pokora a gagné vocalement en ampleur et en nuances. Il y a toujours ce flow caractéristique mais la voix se fait plus voltigeuse, laissant libre cours à une palette d’émotions plus large. Les titres ont été enregistrés au cours de la précédente tournée, pendant les jours off. « Je n’ai jamais été aussi loin avec ma voix. C’était aussi la première fois que j’avais des morceaux qui permettaient de me lâcher totalement dans l’interprétation ». Au-delà de la pop mélodique, des ballades sensibles et accrocheuses (Mon évidence, Si tu pars) en ligne d’horizon. Après une incursion remarquée dans son précédent opus avec En attendant la fin, il passe là encore à la vitesse supérieure.
Un mélange d’impressions personnelles et de fiction alimente un « je » particulièrement présent dans le disque. Matt jette des bouts de refrain, part d’une idée. Laisse la plume à Michel Marteen, Django Jack, et Corneille qui signe un audacieux et fédérateur On est là, dont la musique est de Frédéric Château, le compositeur du succès Les Ricochets. Celui-ci signe également la musique ensoleillée du titre Merci d’être, véritable ode à la femme. Les thèmes sont à l’image de cet élan : hymne générationnel (Le temps qu’il faut), appel à la tolérance (Reste comme tu es), quête de tous les instants (Mes rêveurs), mise en garde éclairée et constructive (Ma poupée), fatalité amoureuse (Si tu pars). Quelques chansons ont aussi tout ce qu’il faut pour inviter au déhanchement. Le morceau Danse sur ma musique ne tardera pas envahir le dance-floor. Même sort pour le puissant Encore + fort et son beat fracassant.
L’instant présent, M Pokora n’en finit pas de la savourer. Il a sa propre définition du bonheur, celle « d’avoir toujours quelque chose en ligne de mire, un moteur continu ». Il surfe sur une spirale enchanteresse : excellent accueil à la fois public et critique du précédent opus Mise à jour (200 000 exemplaires vendus), huit NRJ Music Awards dans son escarcelle (dont celui de meilleur artiste francophone à trois reprises, et celui de la chanson de l’année en 2011 pour sa reprise d’A nos actes manqués), victoire de haute volée dans l’émission Danse avec les stars, invitation à rejoindre le cercle très sélectif des Enfoirés. Ce qui lui importe, c’est de repousser ses limites, de regarder vers demain. Le gaillard a plus d’un tour dans son sac. Et, du coup, tout pour plaire. La scène n’en sera alors qu’incandescente.